الحراك الإخباري - Rayonner sans contraindre : l’avenir par le soft power
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Rayonner sans contraindre : l’avenir par le soft power

منذ 12 ساعة|الأخبار


Ahmed ABDELKRIM

À l’ère de la mondialisation de l’image, de l’opinion et des récits, l’influence ne passe plus exclusivement par les canons ou les sanctions. Elle se joue dans les esprits, les émotions, les perceptions. C’est le règne du soft power — cette capacité à séduire plutôt qu’à contraindre. Dans ce nouvel ordre symbolique, l’Algérie dispose d’atouts considérables. Encore faut-il les activer.

De quoi parle-t-on ? Soft power vs hard power

Le hard power repose sur la force brute : interventions militaires, pression économique, ou menaces diplomatiques. Historiquement, c’est la forme de puissance la plus visible, la plus redoutée, mais aussi la plus contestée.

À l’opposé, le soft power, notion popularisée par le politologue Joseph Nye, désigne la capacité d’un pays à influencer les autres par l’attraction : de sa culture, de ses valeurs, de ses institutions, de son modèle de société ou encore de son action à l’international. C’est une puissance d’inspiration, capable de susciter l’adhésion, l’admiration, voire l’imitation — sans jamais recourir à la contrainte.

Le soft power en action : exemples internationaux

• Les États-Unis déploient leur influence à travers Hollywood, la Silicon Valley, les universités d’élite, la musique pop, les séries Netflix, ou encore leurs valeurs libérales.

• Le Royaume-Uni capitalise sur ses institutions historiques (BBC, monarchie, universités), sur son soft power linguistique et sur une diplomatie d’élégance.

• La Chine investit dans les Instituts Confucius, la diplomatie humanitaire, les médias internationaux, les partenariats éducatifs et la narration positive de son modèle civilisationnel.

• La Corée du Sud illustre un cas d’école : musique (K-pop), cinéma (Parasite, Squid Game), électronique (Samsung) et gastronomie. Résultat : une transformation d’image en profondeur.

Algérie : un potentiel d’influence à valoriser

L’Algérie dispose de ressources immatérielles puissantes pour nourrir une stratégie d’influence mondiale :

• Une légitimité historique issue de la lutte anticoloniale.

• Une culture riche et multiple : musique, gastronomie, cinéma, artisanat.

• Une position géostratégique centrale entre Afrique, Méditerranée et monde arabe.

• Une diplomatie active dans les dossiers sahéliens, palestiniens, africains et méditerranéens.

• Une jeunesse créative et connectée, moteur d’initiatives culturelles et technologiques.

Le soft power algérien peut rayonner avec force, à condition d’être structuré autour d’une vision stratégique, inclusive et ambitieuse.

Cinq leviers pour construire un soft power algérien fort

1. Culture et narration

Créer des contenus puissants : films, documentaires, livres, plateformes culturelles. Multiplier les traductions, les expositions internationales, et les festivals itinérants.

2. Diplomatie académique

Développer des partenariats avec les grandes universités du monde, accueillir des étudiants africains et arabes, promouvoir les centres de recherche algériens.

3. Médias d’influence

Lancer un média multilingue de référence, moderne, professionnel, capable de porter la voix de l’Algérie dans le débat mondial. L’image d’un pays se joue aussi dans les narratifs.

4. Articulation avec la diaspora

Mobiliser les Algériens de l’étranger comme ambassadeurs naturels du pays, dans les universités, les arts, les sciences, les entreprises, et les sphères diplomatiques.

5. Diplomatie humanitaire

Renforcer la présence de l’Algérie dans l’aide internationale, l’envoi d’experts, la coopération technique et médicale. L’image d’un pays bienveillant inspire confiance et respect.

Lobbying, influence et diplomatie parallèle : penser l'invisible

Le soft power se complète par des mécanismes d’influence plus discrets mais tout aussi puissants :

• Développer des think tanks algériens pour produire du contenu stratégique et peser dans les débats internationaux.

• Former des experts en communication, négociation et diplomatie d’influence, capables de parler dans les panels mondiaux, les médias, les cercles de décision.

• Nouer des partenariats avec des cercles d’influence dans les capitales clés : Bruxelles, Paris, Addis-Abeba, Pretoria, Genève, Washington, Riyad.

• Créer un fonds d’influence stratégique pour soutenir les initiatives culturelles, universitaires ou médiatiques à l’étranger.

L’objectif est simple : proposer une vision du monde, faire entendre sa voix, orienter les regards.

Le citoyen, acteur du soft power

Le soft power est aussi l’affaire des individus, pas seulement des États.

• Un étudiant algérien qui brille à l’étranger est un vecteur d’influence.

• Un chef d’entreprise qui développe des partenariats à l’international devient une vitrine du savoir-faire national.

• Un artiste qui expose, un sportif qui gagne, un scientifique qui publie — chacun participe à construire une image positive, respectée et désirée de l’Algérie.

Il s’agit de réhabiliter la fierté constructive, de montrer ce que le pays a à offrir, sans attendre la validation extérieure, mais en proposant un récit ouvert, accueillant, digne et universel.

Quand le soft power produit des résultats concrets

Le soft power, loin d’être un concept abstrait, produit des effets tangibles et mesurables sur le terrain diplomatique, économique et géoculturel. En 2023, par exemple, la Corée du Sud a exporté pour plus de 12 milliards de dollars de contenus culturels (musique, séries, films, jeux vidéo), générant un effet d'entraînement sur le tourisme, les produits de consommation et l’attrait pour la langue coréenne. Le gouvernement sud-coréen considère aujourd’hui la K-pop et les dramas comme un pilier de sa stratégie économique et diplomatique.

De son côté, la Turquie a vu l’exportation de ses séries télévisées exploser dans plus de 150 pays, avec un impact direct sur la perception internationale du pays, le tourisme, et les relations commerciales dans les Balkans, en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. Dans le même esprit, la présence croissante de centres culturels chinois Confucius dans les universités du monde entier sert les ambitions géopolitiques de Pékin, en favorisant une image modernisée et pacifique de la Chine, tout en étendant son influence intellectuelle

La force tranquille du XXIe siècle

Dans un monde où les guerres d’image remplacent les guerres de tranchées, l’influence devient un enjeu stratégique majeur. L’Algérie, riche d’une histoire, d’une culture et d’une jeunesse exceptionnelles, a tous les ingrédients pour faire entendre sa voix. Encore faut-il oser la projeter, la raconter, la partager. Le soft power n’est pas un luxe. C’est un outil de souveraineté, de développement et de positionnement. Une puissance invisible, mais irrésistible — lorsqu’elle est portée par une vision claire, collective et ouverte sur le monde.

تاريخ Jun 29, 2025