Ahmed Abdelkrim
Après le 5 juillet, ensuite le 1er novembre, et demain… le 1er avril peut-être ? Ce serait plus cohérent : on reste dans le registre du canular.
Depuis des semaines, une certaine élite médiatico-diplomatique, autoproclamée experte de l’Algérie, multiplie les pronostics. « Il sera libéré pour le 5 juillet, fête de l’indépendance. » Faux départ. « Non, finalement, ce sera le 1er novembre, date symbolique du déclenchement de la Révolution. » Raté encore. Pourquoi pas le 25 décembre, tant qu’on y est, pour un miracle de fin d’année ?
Entre journalistes en mal de scoops, « grands reporters » en quête d’exotisme, et anciens ambassadeurs recyclés en analystes de plateau, la machine à fantasmes tourne à plein régime. Mention spéciale à Xavier Driencourt, ex-ambassadeur de France à Alger, qui nous gratifie régulièrement de ses grandes révélations sur le "sérail algérien". Un sérail qu’il croit connaître parce qu’il a siroté quelques thés à la Menthe dans des salons feutrés.
Driencourt, semble postuler officieusement au destin de futur patron du renseignement français. Entre publications alambiquées et interventions sur CNews ou Le Figaro, il se rêve en homme de l’ombre, en conseiller des princes, en oracle de l’Algérie, alors qu’il n’est que l’ombre d’un diplomate en mal de reconversion. Son dernier rapport de l'IFRI, où il prophétisait un effondrement imminent de l'État algérien, tenait plus du roman de gare que de l'analyse stratégique. Il confond prévision et projection idéologique, diplomatie et ressentiment néocolonial.
Et pendant ce temps, l’Algérie lui échappe, comme elle a toujours échappé à ces prétendus "spécialistes". Il faut dire qu'on ne comprend pas un peuple à travers le prisme de la nostalgie impériale ni à travers les vitres teintées d'une limousine diplomatique.
Ces experts de pacotille prétendent connaître l’Algérie et les Algériens. Leur lecture du pays s'arrête à l'aéroport d'Alger et au sommaire des rapports de l'AFP.
Alors non, Boualem Sansal ne sera pas libéré le 5 juillet. Ni le 1er novembre. Ni même le 14 juillet, pour faire plaisir à certains. Et ceux qui agitent des dates symboliques en guise de preuves d'analyse politique feraient mieux de s’en tenir à la météo.
Car ce n’est pas avec des déclarations creuses et des sourires de façade qu’on comprend l’Algérie. Ce n’est pas en répétant trois mots d’arabe mal prononcés qu’on pénètre les réalités d’un pays complexe. Et ce n’est sûrement pas en affichant sa nostalgie coloniale à peine voilée qu’on aide à construire un dialogue sincère.
Alors à ceux qui croient encore à une libération prochaine, permettez une suggestion : notez bien le 1er avril. Ce serait plus crédible. Et au moins, on aurait enfin une date qui correspond au niveau de sérieux de certains “analystes”.