Ahmed Abdelkrim

Alger – Depuis quelques jours, une histoire émotive circule dans certains médias étrangers : un groupe d’adolescents algériens, âgés de 14 à 17 ans, aurait traversé la Méditerranée clandestinement pour atteindre l’Espagne, symbole d’une jeunesse “désespérée” fuyant la misère. Ce récit, taillé pour frapper l’opinion, ne résiste pourtant pas à l’examen des faits.

Des incohérences flagrantes

• Un bateau de famille, non volé : L’embarcation utilisée appartenait au père de l’un des jeunes. Nous sommes donc loin de l’image d’un départ désespéré sur une barque volée ou bricolée.

• Un moteur increvable : Le hors-bord Yamaha évoqué est réputé pour sa robustesse. Une “panne soudaine” sans explication technique sérieuse relève davantage de la fiction que de la réalité maritime.

• Des adolescents inexpérimentés : Peut-on sérieusement croire que des mineurs sans formation nautique auraient pu mener une telle traversée, alors même que des marins aguerris savent combien la Méditerranée peut être imprévisible ?

9 heures de traversée “sans GPS” : une fable

L’un des points les plus troublants du récit est la durée annoncée : 9 heures pour rallier l’Espagne. Or, même pour des navigateurs expérimentés, une telle traversée exige des compétences techniques, une maîtrise des courants, et un appareillage minimum.

Sans GPS, comment des adolescents auraient-ils pu garder un cap précis sur près de 300 kilomètres de mer ? Les pêcheurs et marins chevronnés savent qu’il est facile de se perdre ou de dériver. Parler d’une traversée “directe et réussie” dans ces conditions relève d’une histoire à dormir debout.

• Les images virales : preuve ou spectacle ?

• Les vidéos de jeunes qui rient, filment la traversée et atterrissent en bord de plage existent, elles sont puissantes émotionnellement. Mais une vidéo n’explique ni la logistique, ni la chaîne décisionnelle.

• Les images servent souvent à construire une impression plus qu’à établir la réalité complète.

Une jeunesse pas issue de la misère

Contrairement à la narration des réseaux sociaux et de certains médias, ces jeunes ne sont pas issus d’un milieu défavorisé. Le fait qu’ils aient eu accès à une embarcation privée dotée d’un moteur moderne démontre un niveau de confort supérieur à celui de nombreux foyers algériens. Nous sommes donc bien loin de la caricature de l’Algérie “abandonnée par une jeunesse miséreuse”.

Le contexte géopolitique et médiatique

• Il est avéré que l’événement survient durant l’IATF 2025 à Alger, moment où l’Algérie est sous projecteurs. Des observateurs soulignent que ce calendrier renforce l’impact politique et symbolique de cette histoire scabreuse. Les campagnes médiatiques ont souvent une dimension instrumentale - ici il existe une coïncidence temporelle qui mérite d’être questionnée.

Ce récit surgit précisément alors qu’Alger accueille l’Intra-African Trade Fair 2025, vitrine continentale de l’innovation, du commerce intra-africain et de l’intégration économique. Difficile de ne pas voir un lien entre cette campagne médiatique et la volonté de détourner l’attention d’un succès africain porté par l’Algérie.

Quand les récits médiatiques servent des agendas

La sociologie des médias est claire : les histoires de migration sont souvent utilisées comme armes politiques. Dans ce cas, l’objectif est évident :

• Faire croire que l’Algérie ne retient plus sa jeunesse.

• Présenter le pays comme frappé par une misère insoutenable.

Ces affirmations ne tiennent pas face aux faits, mais elles sont efficaces pour frapper l’imaginaire collectif à l’étranger.

Protéger la vérité et l’image de l’Algérie

L’affaire des “adolescents partis en Espagne” illustre parfaitement la fabrication d’un récit émotionnel destiné à fragiliser l’image d’un pays. En réalité, tout montre que nous sommes face à une manipulation médiatique, sortie au moment opportun pour nuire à l’Algérie.

Ce n’est pas un simple fait divers, mais une opération de communication hostile.

L’Algérie, qui accueille l’un des événements africains les plus stratégiques de la décennie, se doit de répondre avec fermeté et de rappeler la vérité des faits.

Non, des adolescents de 14 à 17 ans n’ont pas “fui la misère” sur une barque bricolée pour rallier l’Espagne en 9 heures sans GPS. Oui, une histoire a été montée de toutes pièces pour salir l’image d’un pays qui, plus que jamais, se positionne comme un moteur de l’Afrique moderne et souveraine.