الحراك الإخباري - De la “réponse graduée” de Retailleau et de l’ultimatum de Bayrou
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De la “réponse graduée” de Retailleau et de l’ultimatum de Bayrou

منذ 4 ساعات|الأخبار

Par Abed Charef


A priori, c’est un énième épisode d’un interminable feuilleton sur la crise algéro-française. Dans les faits, ça dépasse largement ce cadre. C’est un renversement des rôles qui vient d’être confirmé ce mardi 13 mai, lorsque le ministère français des Affaires étrangères a convoqué le chargé d’affaires d’Algérie en France, pour lui signifier que Paris allait à son tour, sortir de l’accord de 2013. Le communiqué officiel du Quai d’Orsay indique que «la France prendra les mêmes mesures à l’égard de l’Algérie, dans une stricte réciprocité», après la «décision unilatérale des autorités algériennes d’établir de nouvelles conditions d’accès au territoire algérien» pour les français détenteurs d’un passeport officiel, diplomatique ou de service.

Concrètement, les autorités algériennes venaient de renvoyer quinze fonctionnaires français affectés dans différentes structures diplomatiques et consulaires en Algérie. Ceux-ci étaient entrés en Algérie sur la base de l’accord de 2013, sans avoir demandé les accréditations d’usage. Il devaient remplacer les fonctionnaires expulsés par l’Algérie à la mi-avril, en riposte à la mise en détention d’un agent consulaire algérien accusé d’être impliqué dans une tentative d’enlèvement d’un influenceur algérien installé en France, Amir Boukhors, plus connu sous le pseudonyme de Amir Dz.

Paris perd la main

Ce communiqué du Quai d’Orsay révèle qu’au-delà des mots et des belles formules, les autorités françaises ont perdu la main. Ce n’est plus Paris qui dicte le tempo dans les relations bilatérales, c’est l’Algérie qui prend l’initiative.

C’est en fait toute la stratégie du ministre français de l’Intérieur Bruno Retailleau, stratégie appuyée par l’ancien ambassadeur Xavier Driencourt, qui part en lambeaux. Ce dernier avait multiplié les interventions médiatiques pour expliquer que la France avait des moyens de pression pour faire plier l’Algérie et l’obliger à libérer l’écrivain Boualem Sansal. Selon M. Driencourt, la France pouvait notamment recourir à une suspension, voire l’abrogation éventuelle de l’accord de 1968, qui organise le séjour des Algériens en France, et celui de 2013, qui épargne aux détenteurs de passeports diplomatiques de chacun des deux pays de demander un visa s’ils se rendent dans l’autre pays.

M. Retailleau avait développé la théorie de la «réponse graduée», devenue très en vogue en France. Selon cette démarche, la France avait une large panoplie de leviers pour arriver à ses fins et imposer ses conditions à l’Algérie.

Les faits démentaient ces assertions, mais la surenchère anti-algérienne en France a fait son effet. Bruno Retailleau est devenu populaire, pour se placer comme candidat à la direction de son parti, Les Républicains, voire comme candidat de la droite à la présidentielle de 2027. La France nageait en plein délire, mais en dehors de quelques cercles d’initiés, elle ne s’en rendait pas compte.

Effets de propagande

Cela apparaissait dans quelques épisodes significatifs. Dans une interview, le ministre français des affaires étrangères Jean-Noël Barrot avait déclaré, au début de l’année, qu’il était disposé à se rendre en Algérie pour dépasser la crise des relations bilatérales, mais que la partie algérienne ne le voulait pas. La journaliste, estomaquée, découvrait que le chef de la diplomatie française pouvait être aussi simplement rembarré par un pays africain.

Ensuite, des chiffres sur le commerce extérieur entre les deux pays étaient publiés. La France perdait du terrain. Moins de voitures vendues à l’Algérie, moins de céréales. La chambre de commerce algéro-française avait beau sonner l’alerte, il n’y avait pas de réponse.

Il y avait même une sorte d’aveuglement chez les officiels français, qui semblaient ne plus voir le réel.

Le 13 mars, le ministère algérien des affaires interdisait à ses employés et à leurs familles de se rendre en France ou de transiter par des postes frontaliers français. C’était une sortie de fait de l’accord de 2013.

(Tweet sur la décision du ministère des affaires étrangères

https://x.com//status/1905991485289361548

Tout l’argumentaire français sur des avantages supposés accordés à des dignitaires algériens tombait à l’eau.

Quand à l’accord de 1968, l’ancien ambassadeur algérien Abdelaziz Rahabi a appelé à le dénoncer, car il apportait peu de choses aux ressortissants algériens, tout en leur imposant des contraintes très lourdes.

En un mot comme en cent, M. Retailleau parlait dans le vide, et les arguments de M. Driencourt étaient totalement farfelus, ce qui a d’ailleurs poussé le ministre français des affaires étrangères à le considérer comme piètre analyste et à le qualifier d’irresponsable.

On est loin, très loin, de l’ultimatum de sept semaines adressé par le premier ministre François Bayrou à l’Algérie pour libérer Boualem Sansal, faute de quoi la France prendrait des sanctions. Cet ultimatum a été discrètement enterré, en même temps que la France officielle se rendait compte de l’absence de leviers dont elle disposerait pour faire pression sur l’Algérie, si on excepte celui, très dangereux, de la communauté algérienne en France.

Mais cette réalité de l’impuissance française n’est évidente en France que dans une partie de l’Etat profond. Le reste de la France continue de nager dans l’illusion et la surenchère.

تاريخ May 14, 2025