الحراك الإخباري - Entre l’Égypte et Gaza : la “Global March” passera-t-elle ?
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Entre l’Égypte et Gaza : la “Global March” passera-t-elle ?

منذ يومين|الأخبار


De Paris: Souheila BATTOU 

Journaliste/Cinéaste 


À la frontière de Salloum, entre l’Égypte et la Libye, le monde retient son souffle. La Global March to Gaza est là, suspendue à un passage, porteuse d’un espoir ancien et d’un élan inédit. L’Égypte est à l’épreuve. Ce n’est pas seulement un pays que l’on interroge, mais une mémoire. Une histoire partagée. Car pour des millions d’Arabes, elle demeure un cœur, un refuge, un phare.

Et dans l’attente surgit un autre chant. Non pas celui des slogans ou des discours officiels, mais celui que l’on murmure au bord de l’effondrement, comme une supplique, une prière. Les mots d’Oum Kalthoum résonnent, portés par la brise du désert :

« Donne-moi ma liberté, délivre mes mains. J’ai tant donné… que je ne peux plus. »

Mais au-delà du chant, monte une inquiétude sourde. Un vertige intérieur, un trouble ancien ravivé. Je commence à douter de moi-même, tant je doute de toi… Et pourtant, tu es une partie de moi.

Ce doute n’est pas sans cause. Il naît dans une époque de manipulations subtiles, de récits empoisonnés. Des rumeurs insistantes, que certains attribuent aux officines israéliennes, insinuent que cette caravane serait une provocation déguisée, que des groupes aux agendas troubles s’y infiltreraient, que Gaza serait devenue un fardeau diplomatique.

On évoque, à demi-mot, la crainte que les Frères musulmans ou leurs semblables exploitent cet élan. Ironie cruelle, quand on sait qu’ils ne combattent jamais vraiment Israël, préférant instrumentaliser la cause palestinienne comme un slogan de foule, un levier d’influence.

Et plus loin encore, dans l’ombre de ces soupçons, une rumeur plus stratégique : que cette situation servirait de prétexte rêvé pour qu’Israël ravive un vieux fantasme, celui de vider Gaza de ses habitants et de les repousser vers le Sinaï, transformant la solidarité en chaos, et l’exode en solution cynique.

Et cela dérange. Non seulement les puissances occupantes, mais aussi certaines monarchies, figées dans leur inertie, dont les peuples pour l’instant soumis suivent tout cela, en silence, comme le reste du monde. Certaines vont plus loin. Aux Émirats, des militants de passage vers Gaza sont interceptés, intimidés, humiliés. Une journaliste algérienne y a été retenue 48 heures, menottée, simplement parce qu’on avait découvert sur son téléphone qu’elle participait à la Global March. Comme si leur aéroport devenait le premier check-point israélien avant Rafah. Et dans l’ombre, des soupçons pèsent sur certaines complicités : des milices armées dans Gaza même seraient soutenues pour diviser la résistance et prêter main forte à l’occupant.

Alors, dans ce climat de suspicion savamment entretenu, le soupçon gagne les cœurs. Mon cœur vacille entre l’amour et le soupçon, entre ce que je sais de toi, et ce que l’on dit de toi.

Et pourtant, au fond du doute persiste l’essentiel : c’est parce que nous espérons encore que nous tremblons. C’est parce que nous croyons en toi que ce silence nous brûle.

Nous, Arabes, meurtris dans notre image depuis le 11 septembre, disloqués depuis les guerres d’Irak, avons besoin de ce brin d’espoir. Ce cortège de dignité sur la route de Gaza, nous n’avons même pas eu le temps d’en savourer la beauté. Voir le Maghreb humain, solidaire, uni, marcher côte à côte avec d’autres peuples libres, cela nous bouleverse, car ce tableau est trop beau pour nous. Trop noble. Trop rare.

Et puis, qui d’entre nous n’a jamais rêvé, ne serait-ce qu’un instant, de voir la Palestine libérée non par les armes, mais par une marche d’êtres humains justes, venus de partout, unis dans un même souffle ?

تاريخ Jun 11, 2025